B&N (Bitternut mdr!!!!), tu as noté dans ta signature "grossesse tri-tri en grossesse bi-bi"

? Si ce n'est pas trop indiscret.
Pas de souci, si c’était un sujet tabou, je ne l’aurais pas mis en signature.

J'étais enceinte de triplés, au départ. Pour les grossesses trichoriales triamniotiques, les médecins proposent une réduction embryonnaire pour passer à une grossesse gémellaire, c’est à dire qu'ils arrêtent le coeur d’un des foetus. L’idée étant de donner plus de chances à la grossesse d’arriver à un terme auquel les bébés sont viables.
Mais la réduction comporte des risques car c’est un geste invasif: les placentas peuvent s’infecter et provoquer une fausse couche. Au final, tu as des risques à peu près équivalents quel que soit le choix: si tu continues en grossesse triple, il y a un risque important de fausse couche ou de très grande prématurité pouvant entraîner la perte d’un ou plusieurs bébés, des problèmes de santé... si tu fais la RE, tu élimines un foetus de sûr, le risque de fausse couche est accru par rapport à la grossesse triple, mais les risques d’accouchement prématuré sont moins importants qu’avec une grossesse triple (mais plus qu’une gémellaire "normale").
Donc en gros, il n’y a pas de "bonne" décision a priori.
Nous avons fait le choix de la RE car perdre un bébé qu’on aurait vu naître nous semblait plus insurmontable qu’en perdre un pendant la grossesse. L’investissement émotionnel n’est pas le même, d’autant qu’on a pris la décision rapidement après l’annonce, donc on se projetait avec deux bébés.
Mais ça a été très difficile quand même... On a appris la nouvelle le 2 janvier et la réduction n’a eu lieu que le 6 février, donc pendant cinq semaines, je couvais trois bébés en sachant que je n’en connaîtrais que deux. Ma grossesse était comme entre parenthèses, je ne me suis pas donné le droit de les aimer les trois pour après en éliminer un. J’avais hâte de faire la réduction pour commencer à vivre ma grossesse et j'avais l’impression de "gérer" émotionnellement à l’approche de celle-ci, mais le jour J, quand le brancardier est venu me chercher, j’ai eu du mal à retenir mes larmes.
Ça m’a pris encore un peu de temps pour digérer tout ça, puis j'ai commencé à investir ma grossesse. J’y ai pensé de temps en temps pendant la grossesse, et j'avais un gros pincement au coeur quand les gens disaient, sans savoir, qu’il y aurait pu en avoir trois, ou "t’es sûre qu’il n’y en a pas un troisième?" en voyant mon ventre... (On n’en a pas fait un tabou, mais on a arrêté d’en parler en annonçant la grossesse car on a entendu plus d’une fois qu’il fallait qu'on soit contents, qu’on voit le positif car j'avais eu un peu de mal à tomber enceinte.) À l’approche de l’accouchement, j'y pensais un peu plus, je me demandais ce qu’il en "restait" et j'ai eu une petite pensée au moment de la délivrance.
Maintenant, je me dis que ça a permis à mes puces de naître à un super terme, d’éviter la néonat. Je me dis aussi que deux, ça reste gérable, même si compliqué, mais que trois, ça aurait été difficile de répondre à leurs besoins. Mais je me dis aussi parfois que si elles sont nées à 36+6, à trois, j’aurais pu atteindre un terme suffisant (pas si sûr...). Quand je vois mes puces si différentes et pourtant si merveilleuses, je me demande à quoi aurait ressemblé ce bébé. Et un jour, il faudra qu'on leur explique. Je me réconforte en me disant que j’ai de la chance d’avoir deux bébés en bonne santé qui n’ont pas connu la néonat. Leur naissance n’est pas associée à un drame, c’est un moment de pur bonheur.