À mon Ange victime de mort subite du nourrisson à 1 mois
Titemaman91:
Bonjour,
Je viens de m'inscrire pour discuter avec des mamans de jumeaux meurtries, car vous êtes les seules qui pouvez ressentir les mêmes choses que moi.
Il y a des moments où j'ai l'impression de devenir folle.
Je vais déjà raconter mon histoire, et ensuite j'expliquerai ce qu'est devenu ma aujourd'hui.
Je suis tombée enceinte de mes jumeaux en février 2013, suite à un parcours PMA. Mon troisième et dernier parcours, ma troisième et dernière grossesse. Enfin c'est comme ça que c'était prévu. Dès le premier jour, j'ai su qu'ils étaient deux, je ne peux pas l'expliquer, je ressentais leur présence au plus profond de mon être. Quand j'ai eu confirmation de cette dernière double victoire, j'étais enchantée, quel cadeau merveilleux, des jumeaux, un bébé "surprise" qui ne serait jamais venu autrement (il nous est impossible de concevoir naturellement).
J'ai beaucoup stressé pendant ma grossesse, je craignais la MFIU, la RPM, la trop grande prématurité (mes 2 singletons n'ont pas dépassé 37SA), je trouvais ce bonheur trop beau pour être vrai. Mais plus j'avançais dans ma grossesse, puis je voyais se dessiner la victoire au bout, ça devenait réel, je sortais de "la zone de danger".
J'ai été hospitalisée quelques jours pour stabiliser mes contractions, et strictement alitée peu avant 31SA.
J'ai été suivie uniquement par ma sage femme habituelle en accompagnement global, et je devais initialement accoucher en plateau technique dans sa maternité. Seule condition : atteindre 36SA car sa maternité n'est pas en mesure de prendre en charge des prématurés. Par sécurité, elle m'a fait m'inscrire dans une maternité de niveau 3, afin d'avoir un point de chute.
Mais à 34SA + 2, j'ai perdu du bouchon muqueux, nous avons filé dans cette fameuse maternité, col totalement effacé. Je n'étais pas inquiète pour mes bébés, à 7 mois et demi, je n'imaginais pas que ça se passerait mal.
Après avoir négocié mon accouchement physiologique avec l'équipe sur place que je ne connaissais pas, contre une simple voie d'accès au cas où j2 basculerait. Ce ne fut pas le cas, et vu les circonstances, j'ai eu un bel accouchement, en VB et sans péri. Certes pas celui que j'imaginais, aucune intimité, et mes bébés sont partis de suite, pour les soins. On me les a ramené plusieurs dizaines de minutes après pour un bisou, on m'a dit les sexes, un garçon et une fille (c'était la surprise) et ils sont répartis, l'une en neonat et l'autre en unité kangourou, le temps que des places se libèrent le lendemain (j'ai accouché à 23h).
La séparation a été dure, ma fille a rejoint son frère en UK à 11h du matin, je ne les ai retrouvés qu'à 15h quand j'ai eu moi aussi une chambre en UK. Pourtant j'avais demandé depuis le matin à ce qu'on m'y accompagne (il fallait traverser tout l'hôpital, et en plus la neonat était à l'opposé de l'UK).
Mes petits ont été sondés quelques jours, je tirais mon lait et ils ont été suffisamment autonomes au sein au bout de 10 jours.
Ils sont restés scopés 2 semaines. Ma fille faisait des dénaturations, et mon fils des bradycardies. Mon dieu si j'avais du que c'était un facteur de risque de la mort subite du nourrisson, j'aurais peut-être investi dans du matériel de surveillance. Mais toute l'équipe me disait que c'était fréquent chez les prématurés, et en plus, il remontait toujours tout seul. Je ne me suis pas inquiétée du tout. Ils ont eu plein d'examens entre la prématurité et la gémellité, tout était normal.
Nous sommes sortis à 37 SA, ils avaient 19 jours.
J'étais aux anges, j'avais la famille dont je rêvais. 2 filles, 2 garçons, dont des jumeaux. Cet équilibre si parfait me terrorisait pourtant. Comme si j'avais eu un mauvais pressentiment. Je n'imaginais pas la MSN, mais plutôt un accident...
La veille de leur 1 mois, je me suis couchée, tout était normal, je les ai allaités à 1h45. Puis à 5h, je me suis réveillée, sans raison. J'ai caressé la tête de mon fils qui dormait près de nous, elle était fraîche, mais la tête est toujours chaude. J'ai crié, je l'ai touché, il n'était pas plus frais que quand on a froid, mais il ne respirait plus. Le samu est arrivé en quelques minutes, mais après 30 minutes de réanimation, il a bien fallu se rendre à l'évidence, c'était fini.
Nous sommes partis à l'hôpital où je suis restée 2 jours avec ma fille. J'ai du plus tard que le risque de MSN du jumeau survivant est accru en cas de MSN de l'autre. Chaque heure qui passait m'éloignait de la possibilité que ce ne soit qu'un vilain cauchemar.
Mon fils a été enterré 3 jours plus tard. J'étais dans un état second, j'ai même été surprise de voir arriver toute la famille qui habite à plus de 700km ce jour-là. Je me suis laissée porter.
C'était il y a presque 10 mois. Et autant de temps de souffrance sur laquelle je vais revenir dans un autre post.
Soorire:
Je suis bien triste de t'accueillir ici Titemaman..
Tu es au bon endroit pour faire sortir ce que tu as sur le coeur..et s'échanger.
Comment s’appelait-il ton petit ?
:-* :-* :-* :-* :-* :-* :-* :-* :-* :-* :-* :-*
Elody49:
Titemaman, quelle tristesse de lire ton récit. Je suis sincèrement désolée pour toi et toute la famille. En effet tu es au bon endroit pour t'exprimer et laisser aller ici tout ce que tu souhaites. Il y a toujours une oreille qui traîne pour écouter, réconforter.
J'envoie de tendres pensées à ton petit coeur et vous souhaite à tous beaucoup de courage.
Titemaman91:
Ironie du sort, mon petit garçon portait le prénom d'un Ange.
Depuis qu'il n'est plus là, je suis malheureuse. Plus le temps passe, et plus je m'enfonce.
Les gens sont idiots, ils s'imaginent que parce que j'ai un autre bébé à pouponner, c'est moins difficile. Il n'y a que les mamans de jumeaux qui savent que c'est pire, car en plus de deuil de cet enfant, il faut faire le deuil de la relation si particulière que partagent les jumeaux.
D'autres encore pensent que "ça aurait pu être pire, ça aurait pu être un des grands", la douleur n'est pas proportionnelle à l'âge de l'enfant disparu.
Heureusement il y a aussi des gens qui comprennent que ça ajoute un deuil supplémentaire que les parents de singletons décédés n'ont pas.
Ravoir un enfant m'aiderait, ravoir des jumeaux m'apaiserait, c'est bien différent. Avec la PMA, cet espoir n'est pas utopique. Bien sûr, je ne cherche pas à remplacer mon bébé, juste à trouver un sens à sa mort. Et ne pas être malheureuse et pleine de regrets tout le restant de ma vie.
Mais si seulement c'était aussi simple. Pour Monsieur, c'est exclut. Déjà qu'il avait mal pris l'annonce des jumeaux... Il a mis 2 jours à se projeter avec deux bébés. Mais au début, il a même demandé si le gyneco ne pouvait pas "en enlever un"... Quelle horreur, quand j'y pense.
Avez-vous (eu) ce désir vous aussi ?
Je pense à lui constamment, je n'ai pas une minute de répit. La nuit, j'ai de longues insomnies pendant lesquelles je ressasse. Je pleure tous les jours, je traverse des moments vraiment durs. Chaque fois qu'on va quelque part, on rencontre des jumeaux, chaque fois, ça me fait si mal. Pourquoi c'est pas nous. C'est pas juste. Mais mon mari ne voit rien de ma souffrance et ma détresse. Et puis quand il voit que je suis triste, il n'a aucun geste de réconfort envers moi, et puis il croit que ça passera tout seul. Il ne parle jamais de notre fils en dehors de l'aspect administratif.
Je suis encore en congé parental, je dois reprendre dans un mois, comme c'était initialement prévu avec les jumeaux, sauf que je dois reprendre à 80% au lieu de 60%.
À la maison, j'essaie d'occuper mes mains, ce qui n'est pas incompatible avec mon cerveau encombré. Mais je suis incapable d'avoir des activités intellectuelles. Même regarder un film ou lire un livre, je n´y arrive pas.
Je ne suis jamais à 100% avec mes autres enfants. Je n´ai aucune patience avec eux, ça ne me ressemble tellement pas.
Je ne suis pas prête pour cette reprise, je suis encore plus déprimée. Mais mon mari ne veut pas que je le prolonge, pour des raisons financières (pourtant on s'en sortait finalement. C'est sûr que c'est plus important que ma santé mentale), et puis il doit s'imaginer que ça me fera du bien, mais il vit sur une autre planète, il ne sait pas à quel point c'était dur déjà pendant la PMA. Ma maman me dit de me faire arrêter pour dépression. Je ne trouve pas ça honnête mais j'avoue que j'y pense de plus en plus.
Notre relation est devenue conflictuelle, je n'arrive pas à me confier à lui, et il ne fait rien pour m'y aider. On est agressifs l'un envers l'autre. Moi c'est parce que je me sens incomprise, et qu'il est la barrière à mon apaisement. J'ai peur qu'en plus de cette terrible disparition, on s'inflige un divorce. Je ne veux pas ça, mais si je dois choisir, je ne choisirai pas d'être malheureuse toute ma vie pour lui.
Il y a des moments où je me demande si je ne suis pas en train de devenir folle. Je me raccroche à tout.
Les pensées magiques du type "si je fais ça avant ça, j'aurai des jumeaux".
Si je passe au feu avant qu'il ne passe au orange...
Si j'immobilise la voiture avant que le feu ne passe au vert...
Si j'atteins tel endroit avant que la voiture n'atteigne tel autre endroit..
Si je fais ça avant telle heure...
Des choses complètement débiles.
Je vais aussi sur les sites de tarots gratuits.
Je me demande tout le temps si un jour, on pourra remonter le temps, enfin des choses complètement irrationnelles.
Une partie de moi est morte avec mon fils, je me sens amputée d'une partie de moi-même.
Chaque fois que je regarde ma fille, je l'imagine à côté, il devrait être du même gabarit et au même développement maintenant. Chaque fois qu'on va quelque part, chaque fois qu'on "fête" (parce que moi je n'ai pas le cœur à la fête) un événement, il y a ce vide cruel, si lourd à porter.
Je suis malheureuse et je ne sais pas comment reconstruire ma vie. Pour moi c'est impossible sans au moins un bébé dont la naissance est la "conséquence" de la mort de son frère. Un bonheur issu d'un malheur, qui fasse en sorte que je n'aie plus constamment envie de remonter le temps pour lui sauver la vie. Et plus tard, si cet enfant-là devient "quelqu'un", je comprendrai peut-être pourquoi mon fils a préféré s'effacer, pour permettre sa naissance.
Mais pour ça, j'ai peur de sacrifier l'amour de ma vie. Pourtant c'est avec lui que je voudrais me reconstruire.
À mon petit Gabinou.
Titemaman91:
Je vous remercie de vos réponses, je m'excuse pour toutes ces fautes.
Mon fils s'appelait Gabriel.
Je voudrais bien vous mettre une photo mais je ne sais pas comment faire.
Navigation
[#] Page suivante