Comme promis, j'ai pris un peu de temps et je viens de lire tes messages...
Je me retrouve dans tous tes questionnements, tes paroles... Les mêmes pour moi... C'est très beau Caroline....
Quand Marc est mort, j'étais anéantie, mais pour moi, il était déjà "mon étoile filante", mon petit astre... Par contre je n'ai jamais pu dire ange, et me dire Mamange... Je n'y arrive toujours pas... Mais c'est simplement parce qu'un jour des "Mamanges" un peu trop pressantes et envahissantes on essayé de me dire que je vivais tout comme elles, que se sera toujours pareil et que les autres ne nous comprenaient pas... ça m'a profondément blessée, et j'ai besoin d'aller vers l'avant malgré tout. Ça me faisait penser à une secte dont on ne sort pas...
Ici, même si ça m'a fait très bizarre de me glisser dans le coin des anges... Je sens les choses douloureusement douces... C'est très étrange à décrire, mais c'est sain... Je m'y sens bien. Il n'y a pas l’oppression que j'ai pu ressentir, des gens qui me disaient être "fières d'être mamans d'ange".... Moi je ne le suis pas... C'est ma douleur.
comme je dis sur mon fil de discussion... Il a rassemblé des gens, il a en 36 heures fait des petits miracles mis des galets incroyables pour que nous trouvions notre chemin malgré la douleur... C'est ça mon positif ! C'est aussi tous les gens qui m'ont entouré, des parents d'amis, des gens qui ont fait des kilomètre pour être avec nous... C'est aussi la force qu'il a mis en nous pour nous aider à avancer... Même quand on n'a pas envie.
Oh que oui des gens ont eu des mots désobligeants, maladroits, blessants. Personnes qui ne pouvaient pas toucher du doigt cette douleur (ce que je ne demande à personne) mais grâce à ces gens... J'ai enfin, après, à 33 ans, réussi à apprendre à répondre du tac au tac, à faire se taire certains... Ce que je n'aurais jamais su faire avant.
Mon mari et moi ça a été en dent de scie au début, celui qui coulait était rattrapé par l'autre, puis il y a eu 6 mois un an de chaos ! La guerre froide, les mots durs, les cris... La douleur qui sortait chez chacun. Et c'est notre grande qui a su nous faire nous rassembler, par la douleur qu'elle a laissé échapper à l'école, jamais chez nous... Mes parents ont pris Chloé et Alexandre en vacances d'été cette année-là, plus d'un mois pour nous faire un ballon d'oxygène, pour nous laisser nous affronter sans que les enfants soient là. Il a fallu un soir, des cris, des larmes... Et enfin à la fin de la soirée... les malentendus, la douleur de chacun étaient sortis... Et chacun a enfin compris l'autre. Nous avons passé ce mois à nous reconquérir, à reprendre tout cet air qui nous manquait.
Maintenant nous sommes attentifs à chacun et à nos enfants. Ils viennent avec nous sur la tombe de Marc, et Chloé petite avait déposé une énorme pomme de pin, là Alexandre l'a fait il n'y a pas longtemps. Nous avons mis du lierre, un Hortensia blanc... je n'ai pas pu mettre de plaque ou autre, trop besoin que cela reste doux malgré la tristesse, intime. Nous n'y allons pas souvent, mais quand nous avons besoin.
Nous avons choisi de parler à Alexandre de son frère dès sa naissance... Dès que nous avons enfin pu l'atteindre... Je ne l'ai vu que le lendemain de sa naissance, après la mort de son frère (cf mon post sur le syndrome du stt). Je vous promets... je n'ai jamais assisté à quelque chose d'aussi... émouvant... Et douloureux évidemment.... Quand j'ai enfin pu atteindre la néonat' et sa couveuse... J'ai juste dit en même temps que mon mari "Alexandre, maman est là, nous revenons d'avoir accompagné Marc vers sa mort"... Et au moment où j'ai timidement... Avancé ma grande main vers sa toute petit main (il faisait 44 cm pour 1,800 kg), on l'a vu, d'un coup, se détendre, comment dire... Il était calé dans un petit nid de langes, et il avait l'air limite en apesanteur... Et là je l'ai vu d'un coup se détendre et s'enfoncer dedans tout en enroulant ses doigts touts petits autours de mon index.
J'ai souvent cette impression d'avoir touché un rêve du bout des doigt... En parlant de mes jumeaux.
Les livres... pfff... J'ai du mal avec la théorie depuis... déjà en général je plaisantais depuis ma première grossesse en disant que toutes les grandes certitudes s'arrêtent à la porte d'entrée de la maternité... Je me rends compte... Qu'elles sont toutes parties et que j'ai de plus en plus de mal avec les théories des uns des autres... J'ai assisté à une conférence débat sur le développement de l'enfant jusqu'à l'âge adulte... les parents posaient des questions en attendant des réponses limites hallucinantes... Ils n'avaient, pour beaucoup, que des théories précises en tête... Depuis Alexandre et Marc... Je fais enfin confiance à mon "feeling"... Et j'avoue... Je n'ai jamais aimé les grandes théories à l'école

... Donc déjà je n'étais pas faite pour ça... Mais je lutte du coup contre une grosse perte de confiance en moi... Aussi paradoxal que cela puisse paraitre. Les mots blessants de médecins... ça laisse des traces.
Il y a des livres oui... Mais j'ai trouvé plus facilement des réponses (voir même de grandes claques) Dans des livres comme "la caresse du papillon", et "les perles de la tigresse"... Pour m'occuper de ma grande par exemple, et le premier livre pour Mon petit bonhomme de 4 ans... Les théories de la fille Dolto je ne peux pas... Son livre sur la mort raconté aux enfants me débecte... Je le trouve violent et mal adapté (et ce n'est pas la colère qui parle !!! Promis !)...
je suis désolée, je suis un peu brouillon...
Pour moi si on ne parle pas c'est comme si on parle trop... Et le plus dur c'est ce juste milieu... Trouver les mots... Sont-ils bons ?.. Etc... Et je crois qu'il vaut mieux en parler que cacher. Parce qu'en parler, c'est toucher du doigt le manque qu'on apprivoise sans le laisser s'imposer.
J'entendais je ne sais plus qui qui disait que maintenant on était dans une société où on ne veut pas qu'un enfant aille mal, qu'on ne laisse pas de place à la douleur parce qu'on ne veut pas voir un enfant aller mal... Il faut toujours aller bien, c'est préférable... Mais pour moi, si on veut aller mieux, voir bien... Il faut laisse la douleur parler... Si on met un bâillon dessus... Le jour où celui-ci craque... Se sera des hurlements et ça n'aura pas aidé, bien au contraire.
Mon mari, qui ne savait pas dire les choses avant, les ressentais, je le connais et je le sentais... Mais je ne pouvais pas lui dire "tu vas mal, je le vois"... j'avais peur d'appuyer sur sa douleur... Et lui me disait "tu vas mal" à des moments où je me sentais mieux"... c'est en partie pour ça que nous n'arrivions plus à communiquer... Et quand nous nous sommes expliqués... C'était encore une belle preuve de Mars et Vénus...
Maintenant nous avons pris le parti de nous parler. On ne ressent jamais la même chose que l'autre vraiment, du fait que chacun a eu un vécu différent avant de se rencontrer.
quand tu dis "pas de gâteau là mais une bougie ici"... et la suite... ça me parle tellement. Et cette "leçon de vie"... c'est ça mon positif...
Quand l’aumônière m'a dit "Dieu est venu cueillir sa rose dans le jardin"... J'ai ressenti une grosse colère, j'étais partagée entre l'envie de me dire "mon fils est bien accueilli" et "rendez-le moi, qu'est-ce que vous en savez ?"... mais peu de temps après je me suis souvenue que cette phrase m'avait été comme imposée comme une évidence... Que je trouvais ça (à 15 ans) rassurant...
Maintenant, il va falloir que j'apprenne à dompter ma colère contre le monde médical (une partie... !), que j'apprenne à ne pas m'enflammer si j'entends des mots de médecins cruels et maladroits... Et ça c'est encore pas tout digéré... Il faut que je travaille dessus...