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« Répondre #4 le: 29 Octobre 2007 à 10:26:17 » |
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un petit article de C-S Didierjean-Jouveau : j'aimis le texte entier pour ne pas le dénaturer mais certains passages ne t'intéresseront peut être pas.
Biz
IL FAIT SES NUITS ? LE SOMMEIL NORMAL DU BEBE ET DU JEUNE ENFANT
par Claude-Suzanne Didierjean-Jouveau
Le discours dominant sur le sommeil des bébés
Tout le monde s'attend qu'à tel âge (3 semaines ? 3 mois ?), les bébés "fassent leurs nuits", c'est-à-dire dorment un certain nombre d'heures (6 heures ? 8 heures ? 10 heures ?) sans se réveiller et surtout sang réveiller leurs parents. On s'attend également à ce qu'ils s'endorment tout seuls sans faire d'histoires.
La plupart des livres et des articles de magazines sur le sujet vont dans le même sens. Je pense par exemple au livre de Marie Thirion et Marie-Josèphe Challamel, Le sommeil, le rêve et l'enfant (Albin Michel), où il est dit notamment qu'au-delà de 8 semaines et un poids de 5 kilos, les bébés ont des réserves énergétiques suffisantes pour "tenir" toute la nuit sans manger. S'ils continuent à se réveiller et à réclamer, c'est qu'ils sont "en train de faire fausse route dans leur organisation cérébrale de sommeil" (ça, c'est parfait pour faire peur aux parents) et ont "besoin d'un petit coup de main 'éducatif sans trop tarder" (le coup de main consistant en : supprimer les repas d'endormissement, éviter d'aider le bébé à s'endormir, arriver à supprimer les repas de nuit). (je signale à ce sujet que d'après Kathleen Auerbach, spécialiste bien connue de l'allaitement, à 8 semaines, les bébés prennent environ 30% de leur ration alimentaire entre minuit et 8 heures du matin ... )
En un mot, comme le dit aussi Ferber (voir Allaiter aujourd'hui n° 34, pp. 14-15) et tant d'autres, il faut apprendre aux bébés à dormir. Et si l'on ne commence pas cet apprentissage très tôt, on risque de louper le coche : "C'est dans cette période de 3 à 6 mois ( ... ) que le bébé apprendra le plus facilement à dormir seul, dans son lit, sans ses parents. Au-delà, l'apprentissage (je dirais plutôt : le dressage) serait plus problématique" (Thirion/Challamel). Je pense que ce livre est particulièrement pernicieux, car le nom de Marie Thirion attire beaucoup de femmes qui ont lu et apprécié son livre sur l'allaitement, et ont alors tendance à lui faire confiance sur les autres sujets.
Aux Etats-Unis, les fanas de l'apprentissage du sommeil sont particulièrement virulents. Je pense notamment au programme Babywise du couple Ezzo, qui est contre l'allaitement à la demande et préconise de ne pas répondre aux demandes du bébé (là aussi, tétées nocturnes éliminées à 8 semaines). Si l'on ne suit pas ce programme, on rend un très mauvais service à son enfant, qui deviendra obligatoirement un adolescent rebelle, délinquant et drogué. Une citation des Ezzo, pour vous donner une petite idée : "Dieu merci, Dieu le Père n'est pas intervenu quand son Fils s'est plaint sur la croix"
Les recherches sur le sommeil
Il s'agit d'études électrophysiologiques et d'enregistrements vidéo faits jusqu'à maintenant en laboratoire. La miniaturisation des appareils va permettre que les enregistrements se fassent à domicile, donc dans des conditions beaucoup plus naturelles. A l'exception des études américaines citées plus loin, le sommeil étudié est un sommeil solitaire, ce qui oblige à relativiser les résultats. En effet, comme on le verra, le sommeil solitaire est très différent du sommeil partagé.
Quelques données en vrac :
A la naissance, les cycles de sommeil sont beaucoup plus courts que chez l'adulte : 50 mn contre 90 mn ; les cycles vont peu à peu s'allonger jusqu'à l'adolescence. - En phase de sommeil paradoxal (= "sommeil agité" chez les nouveaux-nés), le réveil est difficile chez l'adulte, facile chez l'enfant. - Avant 3 mois, il n'y a pas d'organisation circadienne (= sur 24 heures) après 3 mois, l'influence circadienne augmente, les périodes de sommeil stable s'allongent pendant la nuit, le "sommeil agité" diminue dans la journée ; mais l'organisation circadienne n'est pas terminée avant 2 ans. La proportion d'enfants qui recommencent à se réveiller la nuit augmente après 9 mois, pour être à son maximum dans la deuxième année ; à 3 ans, 20 à 35% des enfants se réveillent encore la nuit et cela diminue jusqu'à 5 ans (Dr Hélène Nédelcoux, Métiers de la petite enfance, décembre 1995). Chiffres différents dans un article paru dans Que Choisir en janvier 1991 : d'après le Dr Jalin (consultation de troubles du sommeil à l'hôpital St Vincent de Paul), "entre 2 et 3 ans, 60% des enfants se réveillent au moins une fois par nuit, mais seuls 5% ont un vrai trouble du sommeil". Dans une étude finlandaise citée dans Allaiter aujourd'hui n° 10, portant sur 270 bébés âgés de 0 à 12 mois, de 3 à 5 mois, près des 3/4 se réveillent une ou deux fois la nuit; de 6 à 8 mois, les 2/3 ; de 9 à 12 mois, 47%. L'intolérance aux protéines de lait de vache peut causer des réveils plus nombreux que la moyenne : dans une étude portant sur 15 enfants âgés de 7 semaines à 27 mois, qui avaient des difficultés d'endormissement et de fréquents éveils bruyants (de 3 à 10 fois par nuit), un régime excluant les produits laitiers a entraîné la disparition des problèmes en deux à trois semaines ; si les produits laitiers étaient réintroduits, même en faible quantité, les troubles réapparaissaient aussitôt (Publication documents scientifiques Guigol~ n' 120, 1986).
Les études sur le sommeil partagé
MeKenna et son équipe, de l'Irvine School of Médecine, à l'Université de Califomie, ont étudié dans leur laboratoire le sommeil de bébés dormant avec leur mère dans le même lit (co-sleeping) ou dormant dans une pièce séparée (solitary infant sleeping). Ils concluent que le sommeil est très différent dans les deux cas.
Voici ce qu'on observe en cas de co-sleeping - il y a plus de sommeil léger (phases 1 et 2) ; - il y a plus de réveils, et de réveils simultanés mère/enfant (synchronisation des stades de sommeil) ; - il y a augmentation de la fréquence (3 fois plus) et de la durée des tétées (on retrouve ici la composition du lait de femme, "léger" si on le compare à celui d'autres mammifères - par exemple celui des biches) ; - la position de l'enfant est toujours ou dorsale ou - surtout - latérale : le bébé passe 72 à 99% de son temps de sommeil en face à face avec la mère (comme le dit McKenna, pas facile de téter quand on est sur le ventre !) - il y a beaucoup de contacts physiques mère/enfant, même s'il y a assez de place dans le lit pour pouvoir éviter le contact : 28 à 99% du temps de sommeil se passe "en contact", contre 2 à 14% en cas de sommeil solitaire (quand la mère se lève et va voir le bébé) ; - il y a quatre fois plus d'inspections" maternelles (6 à 10 fois par nuit) ce sont toutes les fois où la mère, sans même s'en rendre compte ni se réveiller, vérifie que l'enfant va bien, n'a pas froid ou chaud, remet une couverture ou l'enlève, etc.
Réhabiliter les réveils nocturnes !
McKenna explique cela par l'évolution de l'espèce humaine. On sait que l'apparition de la bipédie a entraîné une modification du bassin et un rétrécissement du canal de la naissance. Dans le même temps, le cerveau de l'homme a beaucoup augmenté de volume. Tout cela a fait que pour pouvoir naître par les voies naturelles, le petit d'homme doit naître prématurément, avant que son cerveau et son crâne n'aient atteint une taille telle que "ça ne passerait pas". Rappelons qu'à la naissance, le cerveau humain n'a que le quart de sa taille adulte (contre 45% chez les chimpanzés, les primates les plus proches de nous).
Cette prématurité porte sur tous les organes et systèmes, et notamment sur le cerveau. Pour McKenna, la médecine et la société occidentales modernes considèrent que les bébés sont physiologiquement autonomes à un âge où ils ne le sont sans doute pas encore, et où ils ont besoin d'être "assistés" par la proximité de l'adulte.
Il n'est pas question de dire ici que le sommeil solitaire est LA cause de la mort subite du nourrisson, qui est multifactorielle. Il n'empêche que lorsqu'il n'y a pas d'autres facteurs de risque (tabagisme maternel, drogue, alcoolisme, obésité), les endroits où l'on observe les taux de mort subite les plus bas sont ceux où la tradition veut que les enfants dorment avec leurs parents (Japon, Hong-Kong ... ).
Et si l'on revient aux observations faites sur le sommeil partagé, on s'aperçoit qu'il y a là plusieurs facteurs de protection contre la mort subite - la position dorsale ou latérale, pratiquement jamais ventrale, - les "inspections" maternelles (on sait notamment que l'hyperthermie est un facteur de risque ; la mère qui est en contact avec son bébé s'aperçoit très vite qu'il a trop chaud, est en sueur..., elle va le découvrir, voire se réveiller complètement pour prendre des mesures) ; - la position face à face fait que le bébé inhale une partie du C02 exhalé par la mère ; or le C02 est connu pour provoquer une augmentation des mouvements respiratoires chez les mammifères ; donc moins de risque d'apnées se prolongeant dangereusement ; - le nombre plus grands de réveils est en soi un facteur de protection. En effet, la mort subite traduit une déficience de la capacité à se réveiller. Quand le bébé dort seul, il a plus de sommeil profond (phases 3 et 4), à un âge où ses mécanismes d'éveil ne sont pas encore au point. De même, on sait que les enfants couchés sur le dos se réveillent plus que ceux couchés sur le ventre. Peut-être la position dorsale est-elle plus sûre entre autres parce qu'elle engendre plus de réveils ! Une étude parue dans Pediatrics en 1997 a confirmé les observations de Mc Kenna. Sur 35 enfants de 11 à 15 semaines, tous allaités, 20 dormaient avec leurs parents depuis la naissance, et 15 dormaient seuls. Chez les premiers, on observait plus de réveils, et plus d'éveils coïncidant avec une période d'éveil de la mère (environ deux fois plus). Là aussi on en déduisait un risque réduit de mort subite.
Une étude anglaise faite par une équipe de l'Université de Durham ("Baby in bed may reduce cot death", NT News, 02/04/98) a abouti aux mêmes résultats. A l'aide de caméras à infrarouges, les auteurs ont filmé pendant la nuit cinq familles dormant avec leur bébé, pendant 80 heures. Ils ont trouvé que la mère et l'enfant avaient des cycles de sommeil synchronisés, ainsi que de nombreux contacts pendant la nuit. Les bébés n'avaient pas trop chaud, et couraient moins de risques de suffocation et de mort subite. La mère était couchée face à son enfant pendant 95% de la nuit, et elle touchait l'enfant pendant la majeure partie de ce temps. Le bébé avait un sommeil moins profond que s'il avait dormi seul, et se réveillait plus ou moins régulièrement pour téter. Les chercheurs concluaient en disant que les parents qui prennent l'enfant dans leur lit doivent savoir qu'il se réveillera plus souvent que s'il dort seul dans une autre pièce, surtout s'il dort avec ses deux parents, et que cela est normal.
Conclusion
En règle générale, dans notre société, on fait tout pour diminuer voire supprimer les réveils nocturnes (sommeil solitaire, "apprentissage du sommeil", position ventrale jusqu'à 'il y a peu, sans parler des somnifères auxquels nombre de bébés ont goûté avant 1 an...
Or il semble bien que ces réveils sont, au moins les premiers mois, un mécanisme physiologique normal qui s'explique par le manque de maturation du bébé. Au-delà des premiers mois, le problème est différent : le bébé plus grand peut sans doute supporter sans danger un sommeil séparé, même s'il préfère sans doute continuer à dormir en compagnie.
Il faut savoir que contrairement à ce qu'on croit, le dormir séparé n'a pas triomphé partout, même dans notre société. D'après une enquête faite dans les années 80, beaucoup d'enfants dormaient dans la chambre de leurs parents chez les ouvriers et les agriculteurs (62,5% en milieu rural), peu chez les cadres moyens et les commerçants.
Je terminerai par une émission de télévision sur des chimpanzés surdoués, en juin 98. Celui qui les a élevés, Désiré Rech, raconte qu'ils ont partagé pendant près de deux ans son quotidien dans une caravane, "s'allongeant entre lui et sa femme après avoir bu leur biberon et mis leur pyjama". Ce à quoi ont droit les chimpanzés, nos bébés n'y ont-ils pas droit ?!
SOMMEIL
Il y a des années de cela, j'avais lu dans une revue médicale (Le Quotidien du Médecin si mes souvenirs sont bons) une enquête faite auprès des parents sur le sommeil de leur enfant.
Dans les études médicales, on considère qu'un enfant "fait ses nuits" lorsqu'il dort au moins 5 heures d'affilée 4 nuits par semaines. Selon ces critères (pas vraiment le tour du cadran), 50% des bébés ne faisaient pas leurs nuits à 4 mois (bébé "tout venant", donc nourri au lait industriel à au moins 95% à cet âge là), et 25% des enfants ne les faisaient toujours pas à 12 mois. Les auteurs concluaient qu'il était parfaitement utopique d'espérer qu'un enfant fasse ses nuits (selon les critères donnés ci-dessus) avant 4 mois.
75% des enfants avaient reçu des sédatifs pendant leur première année, et 20 à 25% en recevaient régulièrement (et ne parlons pas de la rasade d'eau de vie ajoutée régulièrement au biberon pour assommer l'enfant, ça existe, je l'ai vu !!!!!, ça fait des bébés de quelques mois qui arrivent à l'hôpital avec une cirrhose massive). Les auteurs concluaient aussi que les professionnels de santé devraient discuter avec les parents de ce à quoi ils doivent s'attendre en réalité quant au sommeil de leur enfant, afin qu'ils n'aient pas des attentes irréalistes, et afin d'abaisser la consommation de sédatifs chez les nourrissons, dont l'importance est préoccupante.
De très nombreux bébés (allaités ou pas) se réveillent la nuit. Statistiquement, les enfants allaités se réveillent plus souvent et plus longtemps, mais les auteurs pensent que c'est plutôt lié au fait que les mères allaitantes sont plus à l'écoute de leur enfant. Les mères qui donnent un lait industriel sont nettement plus enclines à laisser le bébé hurler la nuit pour le "dresser" à dormir (il est vrai que donner un biberon la nuit est nettement plus pénible qu'allaiter), ce qui a indiscutablement le résultat souhaité chez de nombreux enfants (pas chez tous, il y a des obstinés qui peuvent hurler pendant des heures toutes les nuits pendant des mois et des mois). A quel prix pour l'enfant est obtenu ce résultat, cela n'a jamais été étudié, même si certains spécialistes estiment que cela a un rapport avec l'augmentation importante dans nos pays des troubles psychologiques et psychiatriques. Les hormones de stress, sécrétées par le bébé lorsqu'il pleure, on un impact sur la croissance de son cerveau et le développement des connexions neuronales (donc sur la façon dont l'individu réagira plus tard dans sa vie).
Dans l'ensemble, les réveils nocturnes des jeunes enfants sont beaucoup plus un problème des parents qu'un problème de l'enfant, et c'est avant tout un problème propre à nos sociétés occidentales. Dans de très nombreuses cultures, les enfants dorment avec leur mère (ou leurs parents), éventuellement pendant des années, se réveillent plusieurs fois par nuit, et tout le monde trouve ça normal.
Françoise Railhet
SOMMEIL DE MORT
L'abus de somnifères pour " résoudre les problèmes de sommeil " ne date pas d'hier. Dans les années 1860, un Anglais du nom de Godfrey avait mis au point un " cordial contenant un grain et demi d'opium par once de liquide ". Mis en vente, le produit était utilisé par les nourrices pour " apaiser les enfants lorsqu'ils ont leurs prétendues coliques et lorsqu'ils crient la nuit ". L'abus était patent : on estimait que dans la ville de Nottingham, un quart des enfants mouraient d'un excès de narcotisme ! En France, à la même époque, on faisait plutôt usage de laudanum, de thériaque, de bouillies de têtes de pavot. L'utilisation de ces produits, à titre de " dormitif ", de calmant, conduisant parfois au " sommeil de mort ", était relativement répandu dans le nord et l'est de la France -le pavot était cultivé sur les bords du Rhin- mais aussi dans les régions d'industrie nourricière.
Cité dans la thèse de Catherine Rollet-Echalier, La politique à l'égard de la petite enfance sous la IIIème République, Paris V, 1988.
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